Coronavirus au Sénégal: "les masques faciaux ont sauvé mon atelier de couture"

Khadim Diop en train d'emballer ses masques avant de les livrer
Légende image, Khadim Diop en train d'emballer ses masques avant de les livrer
    • Author, Ndèye Khady LO
    • Role, Senior Journaliste/Digital

La pandémie du coronavirus a mis un frein à l'économie informelle à Dakar.

Plusieurs milliers de jeunes commerçants, tailleurs ou marchands ambulants ont été contraints de restreindre leurs activités face aux mesures prises par les autorités gouvernementales pour freiner la propagation de la maladie.

Le couvre-feu et les restrictions concernant le transport en commun ont mis un coup d'arrêt à ce secteur qui fait vivre des millions de personnes au Sénégal.

Cependant l'obligation de port du masque facial dans les lieux publics a permis à certains d'entre eux de tirer leur épingle du jeu en investissant ce nouveau créneau.

Etabli à Guédiawaye dans la banlieue dakaroise, Khadim Diop, tailleur de profession, s'est adapté à la nouvelle réalité imposée par le coronavirus.

Depuis plus d'un mois, il s'est reconverti dans la confection, la distribution et la vente de masques faciaux.

Business lucratif

Khadim Diop

Un commerce florissant qui lui permet de s'en sortir face aux difficultés liées à la fermeture de son atelier de couture dès le début de la pandémie au Sénégal.

"Les masques, c'est une aubaine pour moi. Je peux me faire jusqu'à 20 000 francs de bénéfices par jour en vendant l'unité à 250 ou 300 francs CFA selon les modèles », indique-t-il.

Il déclare qu'il était pourtant "au bord du gouffre" au début de la crise.

"Il n'y avait plus de baptêmes, plus de mariages ni de fêtes religieuses. Nous les tailleurs, c'est en ces périodes que nos affaires marchent », ajoute-t-il.

Selon Khadim, son atelier de couture fonctionnait au ralenti et il a été obligé de renvoyer ses trois apprentis-tailleurs.

Il a un temps envisagé de vendre ses quatre grands béliers de race à un prix dérisoire.

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"J'ai voulu les vendre juste pour avoir de quoi faire vivre ma famille en ces temps d'incertitudes », précise-t-il.

Si Khadim a renoncé à se séparer de ses moutons, c'est grâce à une idée de business qui lui a permis de gagner de l'argent malgré la pandémie.

Il a transformé son atelier de couture en unité de confection de masques faciaux, puis a réengagé ses trois apprentis libérés au début de la crise.

Il fait aussi travailler cinq jeunes marchands ambulants.

"Je m'en sors très bien. Mes masques se vendent comme des petits pains. Depuis le début de la crise, j'en ai écoulé des milliers. Chaque jour, j'arrive à payer mes trois apprentis tailleurs à raison de 5000 francs chacun», révèle-t-il.

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Une clientèle variée

Un échantillon de masque fabriqué par Khadim Diop
Légende image, Un échantillon de masques fabriqués par Khadim Diop

Khadim Diop a aussi réussi à nouer des partenariats avec plusieurs pharmacies à qui il en a livré.

Babacar Seck, un de ses clients pharmaciens joint par la BBC, confirme les propos de M. Diop.

"Il nous a livré plusieurs centaines de masques en tissu. Il est venu nous montrer ses masques et nous les avons commandés plusieurs fois par centaines", explique-t-il.

Selon M. Seck, avant la pandémie, les masques chirurgicaux et les masques N95 coûtaient 8000 francs CFA la boite de 50 mais, depuis le début de la propagation de la maladie, leur prix est passé de 8000 à 23 000 francs CFA.

"C'était devenu difficile pour la population d'acheter les masques aux normes au prix unitaire de 500 francs, sachant qu'il faut les changer toutes les trois heures. Nous avons commandé des masques lavables chez M. Diop pour en faire des dons aux plus démunis", informe-t-il.

Masque

Il ajoute aussi que les masques fabriqués par M. Diop ne peuvent pas être utilisés en milieu hospitalier car il ne sont pas aussi efficaces que les masques N95.

L'opportunité qu'est la vente de masques fait entrevoir un avenir radieux au tailleur de Guédiawaye.

Cette semaine, il a déposé son stock dans plusieurs zones de commerces.

"J'ai déposé des masques chez plusieurs vendeurs de café, des boutiques de vente de produits de consommation courante. Ce sont des endroits où les gens viennent s'approvisionner. Je veux que mes masques soient visibles partout", déclare-t-il.

Khadim Diop reconnaît que la pandémie du coronavirus est certes une catastrophe mais qu'elle lui a permis de comprendre que même dans les moments les plus difficiles, on peut transformer une contrainte en une opportunité d'affaires.