Vous visualisez une version texte de ce site web qui utilise moins de données. Voir la version principale du site, avec toutes les images et vidéos.
Covid : la pandémie vient-elle d'arriver en Corée du Nord ?
Après avoir passé des années à lutter contre le Covid-19, de nombreux pays dans le monde ont désormais abandonné les restrictions liées au coronavirus et retrouvent un semblant de normalité. Mais la Corée du Nord affirme qu'elle vient tout juste de connaître sa première épidémie majeure.
Le 16 mai, après avoir affirmé pendant des années que l'État totalitaire secret n'avait jamais connu de cas, les médias d'État ont annoncé qu'un très grand nombre de personnes étaient tombées malades à cause de ce que les autorités ont décrit comme une "fièvre".
A surtout lire sur BBC Afrique :
Le nombre réel d'infections pourrait être encore plus élevé que les chiffres officiels, en raison de la capacité limitée des tests et du secret infâme dans lequel s'enferme la nation asiatique.
Il est donc très difficile d'estimer ce qui se passe, mais voici ce que nous savons pour l'instant.
Y a-t-il eu des décès dus au Covid en Corée du Nord ?
On estime qu'environ 15 millions de personnes pourraient être mortes du Covid dans le monde depuis le début de la pandémie en 2020. Mais la Corée du Nord n'a annoncé son premier décès que le 13 mai.
En fait, pendant près de deux ans et demi, Pyongyang s'en est tenu à son affirmation selon laquelle il n'y avait pas eu de cas de la maladie dans le pays grâce à sa décision de fermer ses frontières.
Les médias d'État ont maintenant fait état de 50 décès dus à une "fièvre", mais on ignore combien de ces personnes ont été testées positives au Covid.
Combien de cas y a-t-il ?
Le 16 mai, les médias d'État ont annoncé que plus d'un million de personnes étaient tombées malades, mais trois jours plus tôt, le nombre de cas signalés n'était que de 187 000. Les premiers cas officiels n'ont été annoncés que le 12 mai.
Les autorités ont alors déclaré qu'une épidémie de la variante Omicron s'était déclarée dans la capitale et ont annoncé des mesures de confinement, mais l'agence de presse nationale KCNA a ensuite rapporté que des cas apparaissaient également en dehors de la capitale.
Les experts estiment toutefois qu'il est probable que le virus circule depuis un certain temps.
La Corée du Nord partage des frontières terrestres avec la Corée du Sud et la Chine et les deux pays ont récemment été confrontés à des épidémies majeures - la Chine a même placé certaines de ses plus grandes villes sous un strict contrôle.
Jean McKenzie, correspondante de la BBC en Corée du Sud, estime que les nouvelles récentes pourraient être le signe que Pyongyang change de politique : "le fait que la Corée du Nord fasse état de ses décès quotidiens et du nombre de cas est considéré comme un signe qu'elle a besoin d'aide et qu'elle en veut."
Autre signe, lors de l'une de ses dernières apparitions, dans la semaine du 13 mai, Kim-Jong-un a été vu portant un masque facial pour la première fois depuis le début de la pandémie.
Qu'en est-il du vaccin ?
La Corée du Nord a dit "non, merci" aux offres de la communauté internationale de fournir des vaccins au pays. En fermant ses frontières en janvier 2020, Pyongyang pensait pouvoir maîtriser le virus.
Le 14 mai, cependant, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a déclaré que la récente épidémie était une "grande catastrophe".
"La propagation de l'épidémie maligne est [la plus grande] tourmente qui s'abat sur notre pays depuis sa fondation", explique le dirigeant cité par KCNA.
Alistair Coleman, expert de la BBC en matière de désinformation nord-coréenne, affirme que les raisons du refus des offres de doses de vaccin en provenance de l'étranger ne sont pas claires.
"Certaines sources pensent qu'ils attendent l'un des vaccins à ARNm les plus efficaces" plutôt que de se fier à des vaccins moins efficaces, dit-il.
"D'autres pensent que l'approvisionnement en vaccins étrangers est assorti de conditions inacceptables pour Pyongyang."
Coleman ajoute : "ils auraient été obligés de déclarer le nombre de cas en cours dans le pays, ce qui serait un aveu de défaite dans leur lutte contre le virus."
Selon certaines rumeurs, cependant, des membres de l'élite nord-coréenne auraient été vaccinés.
Le système de santé nord-coréen est-il prêt à faire face au Covid ?
Coleman indique que, depuis 2020, la réponse de la Corée du Nord au Covid a toujours été de nier l'entrée du virus dans le pays.
"La réponse de l'État a été de fermer ses frontières et de mettre en place une stratégie d'hygiène pour prévenir toute infection, comme la pulvérisation des lieux publics comme les gares, les écoles, les hôpitaux, etc...", dit-il.
"Comme tout ce qui concerne la Corée du Nord, [cela a été] dépeint en termes de guerre, une autre bataille contre un ennemi extérieur."
En réalité, le pays ne pourrait pas être moins préparé à combattre la maladie.
Même avant le Covid, la Corée du Nord a vécu dans un état économique fragile. Deux années de fermeture des frontières ont encore aggravé la situation - le Programme alimentaire mondial estime que 11 millions des 25 millions de Nord-Coréens sont sous-alimentés.
"Le système de santé a été et reste assez désastreux", affirme Jieun Baek, fondateur de Lumen, une ONG qui surveille la Corée du Nord.
"C'est un système très décrépit. Hormis les deux millions de personnes qui vivent à Pyongyang, la majeure partie du pays a accès à des soins de santé de très mauvaise qualité."
Des transfuges nord-coréens ont déjà parlé de la réutilisation d'aiguilles dans des seringues et de la transformation de bouteilles de bière en récipients de perfusion improvisés.
Outre le fait que la population n'est pas vaccinée, il y a des pénuries de médicaments et d'équipements de protection individuelle (EPI).
Les tests sont très limités - seuls 64 000 tests ont été effectués depuis le début de la pandémie, selon les chiffres de l'Organisation mondiale de la santé. En comparaison, la Corée du Sud a effectué jusqu'à présent 172 millions de tests.