Conflit Russie - Ukraine : qu'est-ce que Swift et pourquoi l'interdiction de la Russie est-elle si importante ?

    • Author, Par Russell Hotten
    • Role, BBC News

L'Union européenne, les États-Unis, le Royaume-Uni et leurs alliés ont décidé d'exclure un certain nombre de banques russes de Swift, un système de paiement international utilisé par des milliers d'institutions financières.

Cette mesure vise à frapper le réseau bancaire du pays et son accès aux fonds via Swift, qui est essentiel pour le bon déroulement des transactions financières dans le monde.

Qu'est-ce que Swift ?

Swift est l'artère financière mondiale qui permet le transfert fluide et rapide d'argent par-delà les frontières. Il s'agit de l'acronyme de Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication.

Créé en 1973 et basé en Belgique, Swift relie 11 000 banques et institutions dans plus de 200 pays.

Mais Swift n'est pas une banque traditionnelle. Il s'agit d'une sorte de système de messagerie instantanée qui informe les utilisateurs de l'envoi et de l'arrivée des paiements.

Il envoie plus de 40 millions de messages par jour, alors que des milliards de dollars changent de mains entre entreprises et gouvernements.

On pense que plus de 1 % de ces messages concernent des paiements russes.

Qui possède et contrôle Swift ?

Swift a été créé par des banques américaines et européennes, qui ne voulaient pas qu'une seule institution développe son propre système et ait un monopole.

Le réseau est désormais détenu conjointement par plus de 2 000 banques et institutions financières.

Il est supervisé par la Banque nationale de Belgique, en partenariat avec les principales banques centrales du monde, dont la Réserve fédérale américaine et la Banque d'Angleterre.

Swift contribue à rendre possible un commerce international sécurisé pour ses membres et n'est pas censé prendre parti dans les conflits.

Cependant, l'Iran a été banni de Swift en 2012, dans le cadre des sanctions liées à son programme nucléaire. Il a perdu près de la moitié de ses revenus d'exportation de pétrole et 30 % de son commerce extérieur.

Swift affirme qu'il n'a aucune influence sur les sanctions et que toute décision d'en imposer relève des gouvernements.

Quel sera l'impact de l'exclusion de la Russie de Swift ?

À ce stade, on ne sait pas quelles banques russes seront retirées de Swift. Cela devrait se préciser dans les prochains jours.

La déclaration de l'UE, des États-Unis, du Royaume-Uni et d'autres pays indique que cette mesure "garantira la déconnexion de ces banques du système financier international et nuira à leur capacité à opérer au niveau mondial".

L'objectif est de priver les entreprises russes de l'accès aux transactions normales, fluides et instantanées offertes par Swift. Les paiements pour ses précieux produits énergétiques et agricoles seront gravement perturbés.

Les banques seraient susceptibles de devoir traiter directement les unes avec les autres, ce qui ajouterait des retards et des coûts supplémentaires, et finalement couperait les revenus du gouvernement russe.

La Russie a déjà été menacée d'une expulsion de Swift auparavant - en 2014, lorsqu'elle a annexé la Crimée. La Russie a déclaré que la démarche équivaudrait à une déclaration de guerre.

Les alliés occidentaux ne sont pas passés à l'acte, mais la menace a incité la Russie à développer son propre système de transfert transfrontalier, très balbutiant.

Pour se préparer à une telle sanction, le gouvernement russe a créé un système national de cartes de paiement, connu sous le nom de Mir, pour traiter les paiements par carte. Toutefois, peu de pays étrangers l'utilisent actuellement.

Pourquoi l'Occident est-il divisé au sujet de Swift ?

Certaines nations - comme l'Allemagne, la France et l'Italie - ont hésité à prendre des mesures contre l'utilisation de Swift par la Russie.

La Russie est le principal fournisseur de pétrole et de gaz naturel de l'Union européenne, et il ne sera pas facile de trouver d'autres sources d'approvisionnement. Les prix de l'énergie étant déjà très élevés, de nombreux gouvernements veulent éviter de nouvelles perturbations.

Les entreprises à qui la Russie doit de l'argent devraient trouver d'autres moyens d'être payées. Le risque de chaos bancaire international est trop important, estiment certains.

Alexei Kudrin, l'ancien ministre russe des finances, a suggéré que le fait d'être coupé de Swift pourrait réduire l'économie russe de 5 %.

Mais des doutes subsistent quant à l'impact durable sur l'économie russe. Les banques russes pourraient acheminer les paiements via des pays qui n'ont pas imposé de sanctions, comme la Chine, qui dispose de son propre système de paiement.